Un "Steinway & Sons" de concert : la "Rolls" !
Son prix est du même ordre que celui du carrosse sus-nommé.
Depuis quelques années, "Yamaha" lui taille des croupières.
Le "son Steinway" est inimitable.
Alexandre Tharaud arrive sur scène en simplicité noire, chemise tombant sur un pantalon (en jean ?).
Un beau sourire intimidé, un instant de concentration avant, c'est idéal pour commencer un récital en luttant contre le trac, un prélude et une fugue du "Clavier bien tempéré" de Bach.
Belle idée pour installer la communion avec le public qui emplit l'Orangerie de Bagatelle, dans ce parc magnifique dédié à la rose.
Une assistance variée (en cette saison on échappe aux visons) composée d'afficionados, de jeunes pianistes, supputè-je les observant, d'amateurs de musique en vestes de lin froissées, de vieilles dames pomponnées aux parfums entêtants.
Après cette entrée, ce succèderont dix valses de Chopin, dont quelques "tubes", auxquelles le jeune pianiste réussit l'exploit de donner une nouvelle jeunesse, rompant allègrement avec la tradition des pianistes du XXème siècle, Rubinstein en tête (dont on trouve l'enregistrement dans toutes les bonnes maisons), maîtrisant le Steinway de concert (le prix d'une Ferrari, renseignè-je mon jeune voisin !), tirant de l'instrument toute sa substance, les contrastes, en des "forte" musclés mais jamais agressifs, ou un "pianissimo" surprenant de limpidité.
Le soir tombe lentement au fil des oeuvres du polonais dans une atmosphère propice à l'émotion, les fenêtre ayant été judicieusement ouvertes, permettant au regard d'embrasser la splendeur des jardins avoisinant.
Applaudissements brillants après une dernière "Grande valse brillante" où le pianiste peut donner libre cours à une virtuosité imparable, jamais prétentieuse, "domestiquée".
Entr'acte pendant lequel les spectateurs s'éparpillent dans le parc, humant les roses en variétés, déambulant dans les allées, encore sous le charme de ce Chopin redécouvert, encore, sous les doigts du blondinet.
On reprend, franchissant les décennies, avec Ravel, compositeur de plus en plus "moderne", aux harmonies qui surprennent toujours, joué avec une élégance en ressurection de "l'école française", celle des Yves Nat et autres Samson François d'émouvante mémoire.
Encore un "tube" au milieu d'oeuvres savamment choisies et ordonnées, que cette "Pavane pour une infante défunte" entendue mille fois et, pourtant, ici, apparaissant comme rafraîchie peut-être parce que sa fraîcheur est éternelle.
Les "Valses nobles et sentimentales" (quel beau titre), les "Jeux d'eau", le "Menuet antique", et cette Sonatine où tout Ravel réside en symbole de cette musique française retrouvant tout son lustre au début du XXème siècle, après quasiment deux siècles de léthargie.
Ovation d'après Ravel, bis en générosité "nature", le "Tombeau de Couperin" (du même Ravel) puis, quelle intelligence !, du Couperin, naturellement, ces "Barricades mystérieuses" et ce "Tic toc choc" qui font actuellement mon quotidien.
Alexandre Tharaud nous parle comme en confidence de Germaine Mounier, récemment décédée, initiatrice de ce festival, qui, dit-il, fit prendre conscience au jeune élève qu'il fut, que le piano serait sa vie.
Celui que certains ont surnommé connement "Le petit prince du piano" est tout autre chose : un grand, un très grand pianiste.
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