Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

samedi 18 octobre 2008

Sauvons la daube !


Il faut sauver la daube.
Non, je n'évoque pas le contenu des programmes de téèfin, mais de ce plat qui demande à mariner toute la nuit, puis à mijoter lentement*.
Le Credoc, un organisme vachement sérieux, se livre régulièrement à des enquêtes sur les habitudes alimentaires des français et signale que ce plat serait en voie de disparition !

Je garde un souvenir attendri de ma première daube locale, au fin fond d'une ruelle du vieux Nice, car pour moi il n'est de daube que niçoise.
L'ancien maire de la ville de Masséna, Jacques Médecin, qui était par ailleurs un fieffé grigou, avait fait éditer chez Solar** les recettes griffonnées dans un carnet par sa cuisinière de mère : la daube y tenait place de choix, entre "pissaladière" et "merda di can" (terme évocateur pour des gnocchi verts !).
La daube niçoise se distingue par l'utilisation de cèpes du pays dans la recette, de zestes d'orange et de citron dans la marinade et surtout parce qu'elle est accompagnée de raviolis "maison" farcis impérativement de la même viande, du paleron, du jarret ou du gîte à la noix.
On peut sans commettre un sacrilège l'accompagner de gnocchi, voire de polenta.
Il est évidemment indispensable de choisir pour la marinade un vin rouge charnu, parfumé, pas de la "Villageoise", quoi.
Enfin, on aimera mettre à la disposition des convives du parmesan râpé et du jus de citron.

Il me revient aussi que nous allions en bande déguster une daube sur le marché Forville, à Cannes, sur les coups de 5 heures du matin dans un bistro où se côtoyaient fêtards sortant "de boîte" et travailleurs de l'aube, éboueurs et marchands.

Vous comprendrez mon émotion à la lecture des résultats de cette étude sur les habitudes alimentaires de mes compatriotes, de cette tendance au "snacking" qu'elle révèle et de l'abandon progressif de ces mets savoureux à faire pleurer les anges de la baie.


*lentement : avec lenteur, en déstressement, tranquille, en oubli de trépidations contemporaines.
Après avoir mariné pendant douze heures pendant que vous dormez, la daube mijotera pendant près de quatre heures : après cela, elle fondra en bouche déclenchant un bonheur inexprimable.

**J'avais égaré ce livre ; ma vie en était affadie.
J'apprends aujourd'hui qu'il a été réédité sous la titre "La bonne cuisine du comté de Nice".
Et ça se lit comme un roman.

A François Simon, le justicier masqué.

Aucun commentaire: