Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

mercredi 22 octobre 2008

La femme du boulanger

Ce sera tout ? (Karin Viard)

Ne serait-ce que pour la prestation de Karin Viard en boulangère, le film Paris, de Cédric Klapisch est aussi agréable à déguster qu'un éclair au chocolat.
L'actrice nous venge de tous les "avec ceci ?" subis au cours des années, des "une tradition ?" quand on demande un simple baguette, des commentaires humiliants assénés à la "petite vendeuse" en public avec sous-entendus xénophobes...

Les plumitifs dirons que Paris est un film choral : on frémira à la pensée de ce qu'un Lelouch aurait pu faire d'un pareil sujet où se mêlent les avatars existentiels d'une palette de personnages divers de statut social différent.
Destins entrecroisés de "bobos" et de travailleurs de l'aube que Klapisch nous dépeint avec une infinie tendresse.
Il pourrait être insupportable à certains de voir une fois de plus Luchini faire son numéro de danseur de rythm & blues (le vrai, pas le "r&b" pour minettes) quand je le trouve, moi, éblouissant et drôlissime dans l'exercice.
Dire que Juliette Binoche est belle relève de la banalité ; savoir filmer cette beauté qui n'est pas qu'extérieure n'est pas le moindre mérite d'un cinéaste qui, mine de rien, avec ses films sans prétention sociologique (et pourtant !), du "Péril jeune" à ce dernier, en passant par des auberges espagnoles devant lesquelles certains beaux esprits se pincent le nez, trace un portrait souvent juste de nos contemporains.
Oui, le film a "des moyens" : il montre un Paris idéal (idéalisé ?) que nous ne savons pas voir, dépeignant en parallèle la "vie de chien", là-bas en Afrique, des aspirants à l'émigration que la ville lumière attire comme des phalènes et on comprend pourquoi.
Mine de rien, et même si l'on peut regretter que le sujet ne soit abordé que superficiellement (mais ce n'est pas vraiment le propos), le film évoque l'extraordinaire disparité entre pays riches et pays du tiers-monde.
Le regard sur Paris dans les yeux de Romain Duris à la toute fin du film recèle émerveillement, doutes, espoir.
Le fait que l'on peut craindre que la "ville lumière" devienne peu à peu une "ville-musée", se vidant progressivement des habitants appartenant aux classes moyennes n'est pas occulté pour autant.
Ce fut le sujet d'une discussion l'autre soir à la maison où l'action de Delanoë était jugée sans aménité par un ami peu suspect d'opinions droitières.
Cet ami trouvera sans doute, s'il le voit, que le Paris de Klapisch est un film "delanoïste".
C'est un film bourré de contradictions, hésitant entre deux visions de la capitale comme la politique de l'actuelle majorité municipale.
C'est aussi un chant d'amour à une ville "aimable" quand on sait la regarder.


L'amour d'une soeur (J.Binoche) pour un homme en sursis (R.Duris)

Aucun commentaire: