Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
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"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)
jeudi 3 janvier 2008
Gauche couscous et steak tartare.
La salle Renaud-Barrault (ou Renault-Barraud ?) du Théâtre du Rond Point accueille jusqu'à samedi le spectacle de Guy Bedos "Hier, aujourd'hui, et demain" auquel j'étais aimablement invité hier soir (merci Véra !).
Je suis un fan de longue date de l'humoriste dont, à une certaine époque, je connaissais par cœur tous les sketches écrits avec Dabadie, de "Marrakech" à "Saint Tropez, c'est trop snob !" en passant par "Pauv' gosse", "Le foot, le foot" ou le célébrissime "Bonne fête Paulette".
A l'époque, giscardienne, où "le système Médecin" faisait la loi à Nice, Bedos y remplissait le théâtre à chaque passage, et on avait un peu l'impression d'aller à une réunion de clandestins en lutte quand on allait chercher notre provision de rire de gauche.
Le procédé Bedos est désormais bien connu qui consiste à alterner sketches et revue de l'actu en un spectacle où la réflexion se mêle au spectacle pur, sans jamais (tour de force !) virer au "meeting" politique.
J'avais hier pour voisine immédiate Josiane Balasko* que j'observais du coin de l'oeil, ayant la nette impression qu'elle ressentait le spectacle avec le même recul que moi : Bedos, on le connaît, il est drôle, il est beau et en pleine forme (à "73 ans et demi !"), il est féroce mais sûrement vraiment gentil et parvient encore à nous surprendre au gré du déroulement de son spectacle.
Au Cirque d'Hiver, l'an dernier, je l'avais trouvé un peu las, soliloquant dans sa barbe, long, trop long au point que certains spectateurs quittaient la salle avant la fin et j'en étais sorti malheureux pour lui.
Dans l'espace plus "humain", moins "ménagerie", que Jean Michel Ribes anime avec passion, Bedos retrouve une vraie dimension, une proximité qui lui va bien au teint.
Depuis son passage chez Bouglione, il y a eu l'accession au pouvoir de "Badinguet" (surnom de Napoléon III, dit aussi "Napoléon le petit") dont le début de quinquennat est une mine d'or pour les humoristes.
Quand ils ont le talent et l'acuité de notre (faux) teigneux qui a "jeté ses lunettes d'aviateur", ça donne une succession d'escarmouches anti-N.S. qui déclenchent de vrais "rires de résistance"**.
Ayant la bonne idée de terminer son spectacle par ce qui fut longtemps son "cri de guerre", cet excellent "La vie est une comédie italienne", où il évoque Fellini, Risi, Monicelli et le Scola de "Nous nous sommes tant aimés", Bedos, cette fois, retient les spectateurs jusqu'au point final, déclenchant une "standing ovation", une vraie, pas comme à la télé où le public décérébré se lève pour accueillir le premier "people" venu.
Lui mérite l'hommage : c'est un grand.
Le "Rond Point", au temps de Marcel Maréchal, permettait de déguster l'un des meilleurs tartares de la capitale, préparé "au couteau" avec amour.
Je fus surpris de constater hier qu'on pouvait rater une recette aussi basique en présentant la viande (de qualité cependant) nappée d'une "sauce" improbable que j'ai pu heureusement rectifier.
L'environnement, un personnel agréable et un Haut Médoc 2004 très honnête ont néanmoins permis de faire de cette soirée une belle réussite.
A deux pas de l'Elysée, on se sentait un peu vengé.
* Sans-papiers, sans logis, Balasko et Bedos sont de ces combats là, le comédien-humoriste se définissant comme faisant partie de la "gauche couscous" en réponse au lieu commun "gauche caviar" dont se gargarisent les cons qui oublient les origines ou la position sociales des grands noms qui ont porté les idées progressistes tout au long de l'histoire de France.
** "L'opposition officielle" en prend aussi pour son grade, de Dray à Hollande sans oublier la "bête noire" Jospin.
Seule Ségolène est épargnée, l'humoriste sachant aussi faire preuve d'élégance.
Et d'une secrète admiration ?
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