Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

jeudi 11 novembre 2010

Kubrick, Douglas, et la grande boucherie de 14-18



Lors de la guerre de 1914-1918, tandis que le conflit s'est enlisé depuis longtemps dans la guerre de tranchées, l'état-major français décide une offensive quasiment impossible sur la « colline aux fourmis ». 
Repoussé par le feu ennemi, le 701e régiment, commandé par le colonel Dax, doit se replier. Le général Mireau, chef de l'offensive, demande alors de traduire en conseil de guerre le régiment pour « lâcheté ». 
Malgré l'opposition de Dax, trois hommes tirés au sort seront condamnés à mort et exécutés. 
Dax avait entre-temps soumis au général Broulard, chef de l'état major, les preuves que le général Mireau avait fait tirer sur sa propre armée pendant l'attaque. Broulard révoque celui-ci et propose son poste à Dax en croyant que celui-ci avait agi par simple ambition. Dax refuse.


Réalisé en 1957, "Les sentiers de la gloire" (Path of glory) ne fut visible par les spectateurs français qu'en... 1975 !
C'est l'acteur Kirk Douglas qui, par son désir de jouer Dax, permit à Stanley Kubrick de convaincre les producteurs de porter à l'écran le roman de Humphrey Cobb qui avait connu un énorme succès en 1935 aux USA.
Les différents gouvernements français ne voulaient pas que soit porté à la connaissance du public que, pendant la grande boucherie de 14-18, près de 2000 soldats français furent fusillés pour refus d'obéissance à des ordres imbéciles, leur "délit" étant pour la circonstance de "lâcheté devant l'ennemi".
Le film magistral du grand cinéaste fut donc boycotté et beaucoup de cinéphiles firent le voyage jusqu'en Belgique pour le voir !
Il acquit ainsi le statut de "film-culte".
Aujourd'hui considéré comme un chef-d'oeuvre de plus à l'actif de Kubrick, le film, porté par un Douglas totalement investi, est l'une des plus fortes dénonciations des absurdités de la guerre jamais projetée sur un écran.


En 1998, Lionel Jospin, alors Premier Ministre, avait déclenché un beau tollé à droite (!) lors d'un discours qui appelait au souvenir de ces hommes fusillés "pour l'exemple" :
« Certains de ces soldats, épuisés par des attaques condamnées à l’avance, plongés dans un désespoir sans fond, refusèrent d’être sacrifiés », avait dit Jospin, avant de souhaiter que les fusillés « réintègrent pleinement notre mémoire collective nationale »





Le Colonel Dax (Kirk Douglas) ne pourra défendre la cause des prétendus "mutins".


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