Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

dimanche 16 mai 2010

Nourrissant

C'est l'un des souvenirs de mon séjour à Trieste l'été dernier, cette ville mélancolique où se délitent lentement les miasmes de l'empire austro-hongrois y compris dans la cuisine locale.
Ces gnocchi (prononcer "niokis" : ras-le-bol de ces parigots qui articulent ça comme "gnous" !) au goulash en témoignent que je me suis mis en devoir de concocter pour les amis qui viennent diner ce soir.
Hier après-midi, le goulash a mijoté pendant 3 heures et je lui redonnerai une bonne heure de frémissements pendant l'apéritif (un spritz, bien sûr) afin que la viande ( de celles dont on fait le "bourguignon") soit la plus fondante possible et s'imprègne des diverses épices dont l'essentiel paprika que je n'ai pu trouver dans sa version la plus puissante ; j'aurais dû pour cela diriger mes pas vers des secteurs plus colorés du dix-huitième, là où l'on peut acheter des citrons confits bien gluants pour les tajines et de rares épices orientales.
 Hier au Caveau, Proust (pas Marcel, l'autre) le slovène me disait avec cette once de mépris dans la voix et dans l'attitude qui lui sont coutumières que le goulash n'était, en fait, qu'un "vulgaire ragoût".
Ce à quoi j'aurais dû rétorquer que dans "ragoût" il y a "goût".
En ces temps de zapping effréné combien de nos contemporains s'adonnent encore au plaisir du mijotage un après-midi sur fond de Mozart en surveillant consciencieusement le frichti qui palpite dans la cocotte en
fonte ?


Ce sera sans doute l'un des derniers "plats d'hiver" sortis de mes fourneaux puisqu'on nous annonce le retour du printemps et qu'effectivement le ciel et la température se font aujourd'hui plus cléments.
J'ai fait ce matin mon petit tour quasiment rituel du marché du boulevard Ornano où il faut une patience en mode bonne humeur pour se frayer un chemin entre les chalands ; ce qui me permet de (me) rappeler qu'un étal "bien achalandé" est un banc qui attire une nombreuse clientèle et non pas un commerce débordant de marchandises.
Il m'est arrivé de faire cette erreur de langage ; plus maintenant depuis que j'ai retrouvé le plaisir de lire.
Et d'écrire pour ne rien dire.

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