LES TEMOINS
André Téchiné nous offre ici l'un de ses meilleurs films, évocation du début des "années sida", à l'heure où l'on déplore un regain d'inconscience dans les couches les plus à risque de la population (les jeunes, en particulier).
Rassurez-vous, ce n'est pas un film "clinique" : c'est une histoire d'amour(s) et d'amitiés sous la menace qui gronde, une chronique de l'insouciance qui précède le drame historique de l'épidémie qui noircit la fin du XXème siècle et n'a pas fini de faire des ravages.
C'est exceptionnellement filmé (la calanque de Sormiou sous son soleil implacable, où, en fait, tout se noue et se dénoue), et la distribution est parfaite : Michel Blanc trouve ici un rôle à la mesure de son talent qui, sans doute, le "césarisera" (enfin !) en 2008.
Il parvient à susciter sans cesse l'émotion sans effets appuyés, sans cabotinage, sobrement. Autour de lui, Bouajila confirme son ascension en flic consciencieux découvrant les aspects cachés de sa personnalité, tandis qu'Emmanuelle Beart, impliquée, donne à son personnage une vraie consistance, une profondeur telle qu'on arrive à oublier qu'elle est divinement belle, la Manon de nos jeunesses !
Dans la famille Depardieu, je demande la fille : Julie nous prouve qu'un second rôle peut être un grand rôle.
Enfin, mention spéciale pour la composition étonnante du jeune Johan Libéreau, déjà remarqué en 2005 dans l'excellent "Douches froides" d'Anthony Cordier.
De la beauté presque adolescente à la déchéance physique dûe à la maladie, son personnage éveille en nous plus que de la compassion.
Film abouti où rien n'est négligé, de la magnifique photo de Julien Hirsh à la belle partition de Philippe Sarde, "Les Témoins" permettront sans doute à Téchiné de renouer avec le succès, sans promo tonitruante avec passage obligé chez Cauet : simplement parce que ses premiers spectateurs, bouleversés, voudront faire partager à ceux qu'ils aiment, ce pur moment d'émotion cinématographique.
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