Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

dimanche 27 juin 2010

Après le tumulte

Douceur sans nom d'un dimanche matin lumineux dans la plaine de Montmartre.
Le quartier, vers les dix heures, semble reprendre son souffle ; "ils" ont dû migrer vers la mer ou la campagne, encouragés par les premières chaleurs.
Tu as raison, l'ami : Mozart est toujours à sa place partout et en tous temps.
Dans le coffret des concertos, j'ai pris un disque au hasard et la musique embaume comme un bouquet de roses.

Hier, un samedi en point culminant d'une saison riche en événements.
Je suis allé traîner mes guêtres (qui sait encore ce que sont des guêtres ? Fred Astaire est mort depuis longtemps) vers les six heures de l'après-midi à la Bastille où déboulait l'immense cortège de ce que les américains appellent la "gay pride".
Une foule qui danse, comme saoule, sous un soleil implacable ; des hurluberlus comme la télé en montre toujours ces jours-là, minoritaires pourtant parmi ces milliers d'humains terriblement humains dans leur diversité, jeunes, vieux, familles avec enfants, sous le regard peu amène de "forces de l'ordre" décontenancées, abasourdies, assourdies par les décibels déversées par les sonos ultra-puissantes.
Tous ces gens sur les chars, postiers, cheminots, flics (si !), employés, ouvriers, gens de la nuit, fiers d'être ce qu'ils sont et le criant à la face du monde.
Le vrombissement des basses vous fait trembler sur vos jambes ; les merguez des petits toulousains sont excellentes ; il y a de belles filles et des beaux garçons, des vieux travelos trouvant ici un sursaut d'énergie longtemps contenue ; le fond de teint ne résiste pas aux 30° à l'ombre de ce drôle de weekend.


Je remonte le boulevard Beaumarchais ou le redescend, peu importe, pour rejoindre la Place de la République ; la grande artère est exceptionnellement vide de toute circulation ; on peut s'attabler à la terrasse d'une brasserie, tranquillement, quand, à quelques centaines de mètres, le concert met en transes ces milliers de fêtards désireux de bouffer de la vie à pleines gorgées.
La bière est fraîche, le serveur affable ; on n'est plus à Paris.

Pour la "dernière" de la saison du Caveau de la République, on s'est fait une petite fête : Fromet a fait un gâteau qui se délite de tant de tendresse, ma pissaladière fait un malheur, le tarama de Christine n'a jamais été aussi bon, le vin nous grise qui nous permet de transmettre au public notre bonheur d'être ensemble et notre peine de nous séparer le temps d'un été.
Il y a quelque chose de magique : les spectateurs, ignorant pourtant, au départ, que c'est l'ultime représentation, ont capté ce climat particulier et se retrouvent immédiatement en phase avec nous.
Je fais trop long en début de soirée, mais ça marche : je les brocarde gentiment, les félicitant d'avoir encore le courage d'aller au spectacle après une "gay pride" épuisante (c'est pas du tout "le genre" de l'assistance, mais ils jouent le jeu).
La soirée va crescendo ; comme le veut la tradition, on se fait quelques blagues sur scène tout au long de la représentation.
Un gamin de 15 ans a amené sa maman en guise de cadeau d'anniversaire ; une surprise.
Au final, l'équipe monte sur scène pour lui offrir... Gilles Détroit !
Ebahie, la spectatrice se voit offrir DVD, CD, affiches : elle n'oubliera pas cette soirée.
Son fils est heureux et pas mécontent de son choix.
10 semaines vont s'écouler avant que reprennent les représentations ; comme chaque année, les premières seront "moyennes", balbutiantes presque, puis, la période de "rodage" passée, nous serons installés, chez nous : il y aura des triomphes mais aussi des "taules" quand l'alchimie avec le public ne se créera pas parce que "quand ça veut pas...".

En attendant, le silence qui suit Mozart, c'est encore Mozart.


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