Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

jeudi 19 novembre 2009

Footaises

Mon baladeur n'est pas assez puissant.
Sony a pensé aux oreilles des adeptes du rap, de la techno ou du èrindbi en limitant les décibels de ses appareils, dans un louable souci (à moins qu'il existe une loi ?) de préserver la capicité auditive de sa jeune clientèle.
Mais allez donc vibrer sur les "Saisons" de Haydn quand tout autour de vous cornes de brumes, avertisseurs sonores et pétards célèbrent le but, puis la victoire de l'Algérie sur l'Egypte en ce substitut à la "vraie" guerre qui a pour nom football.
Il était difficile, hier, d'échapper au déferlement médiatique consacré au sport dit "de masses" qui occultait, pour un temps, les préoccupations quotidiennes qui accablent l'humanité : crise, faim, injustices, inégalités, chômage, conditions de travail, misère...
Il fallait donc se réfugier dans Haydn ou dans la Messe en Si de J.S.B pour fuir le tintamarre environnant.
Au Caveau, qui, pour la seconde fois, recevait une partie des Maires de France réunis ces jours-ci dans la capitale, le mot "foot" ne fut pas prononcé une seule fois : ce ne fut pas le moindre mérite des humoristes que de faire oublier aux spectateurs venus en nombre (pas un strapontin de libre !) qu'une rencontre essentielle pour l'avenir du peuple de France était en train de se jouer au cirque de Saint Denis.
Quand on rentrait chez soi, heureux de la joie collectivement distribuée aux élus de la République en goguette d'après-congrès, on allumait machinalement la télévision, se disant qu'avec un peu de chance "la 3" et son aimable Taddei nous préserveraient de la folie du moment.
Las, c'était vraiment "Ce soir", même si l'on avait espéré que ce fut "jamais".
Sur ce plateau, toujours bien fréquenté, il y avait un membre du Djamel Comédie Club qui, à l'instant où j'allumai exprimait de doctes avis sur le patriotisme dans le foot, car c'était le sujet du débat (en raccourci du foot, "dernier refuge de l'identité nationale" !).
Y figurait aussi, plus réservé, intimidé sans doute, qu'à l'accoutumée, l'inoubliable ex-secrétaire aux sports nommé Bernard Laporte et, heureusement, un philosophe du nom de Vincent Cespedes qui réussit l'exploit de m'empêcher d'éteindre mon téléviseur.
Beau mec volubile, cet "intello" s'exprimant sans intellectualisme, avec un humour salvateur, comparait la joie des supporteurs victorieux à un orgasme collectif suppléant, c'est moi qui le dis, les frustrations de l'existence.
J'en déduisis donc que ce spectacle s'adressait tout particulièrement à un public de mal-baisés.
Ce n'est qu'une vision personnelle ; elle me convient tout à fait.


 Vincent Cespedes : site (à visiter absolument !)


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